Les mediums en peinture a l'huile

Les médiums en peinture à l’huile

De quoi est composée une peinture ?

Une peinture, je parle ici du matériau (ce qui est dans le tube) et non d’un tableau, est systématiquement composée de pigments colorés en poudre liés en une pâte. La chose qui permet de lier et de fixer ces pigments sur le support s’appelle le médium.
Par exemple, la peinture acrylique. Elle est composée de pigment en poudre finement broyés et liés avec un liant acryle (issue de la pétrochimie, ça ressemble à de la colle à bois). On peint en ajoutant de l’eau, ce qui va diluer plus ou moins le liant acryle. Une fois sec, donc évaporation totale de l’eau, l’acryle forme un film plastique emprisonnant les grains de pigment. La couche est alors imperméable, durablement fixée, les couleurs ne bougent plus.

Exemple particulier : l’aquarelle. Le médium est l’eau. il permet d’étendre la peinture avec de nombreux effets mais en revanche il fixe très mal le pigment. Une goutte d’eau sur une aquarelle sèche suffira à modifier et altérer les couleurs. C’est une des rares techniques de peinture dont le médium ne fait pas office de fixatif.

En peinture à l’huile ce médium est composé de plusieurs ingrédients et fait l’objet de nombreuses recettes plus ou moins secrètes selon les peintres ou ateliers. On retrouve différentes recettes dans le commerce qui sont elles aussi sous le coup du secret industriel.

Bref, de secrets industriels en cachoteries d’ateliers il est difficile de savoir qui peint avec quoi.

Je vais essayer ici de vous exposer les bases des mediums à l’huile et je vous donnerai la recette du médium que nous utilisons dans nos cours.

La composition du médium

En peinture à l’huile le médium contient principalement 3 ingrédients :

  • Une huile
  • Une résine
  • Une essence

L’huile apporte un peu de brillance, donne de l’onctuosité et surtout permet un travail sur la durée car très lente à sécher. D’où des palettes de couleurs d’une grande richesse avec des variations et des fondus très subtils. Mais cette lenteur de séchage est aussi son plus gros inconvénient.

La résine donne à la peinture plus de brillance, sa résistance dans le temps et permet surtout de compenser la lenteur de séchage de l’huile. Elle agit plutôt comme un gélifiant puissant qui fige la couche de peinture. Celle ci n’est pas sèche mais juste figée. Ce n’est pas un siccatif dont le rôle est d’accélérer le séchage.

L’essence permet d’une part de dissoudre la résine pour la rendre miscible avec l’huile. D’autre part l’essence permet d’alléger le medium en huile pour que celui ci soit moins gras. L’essence est la composante dite maigre du médium.

Les ingrédients de notre médium

Notre huile

Nous choisissons l’huile de lin clarifiée. C’est une huile peu colorée, peu colorante, au séchage rapide pour une huile. C’est l’huile utilisée dès l’invention de la peinture à l’huile. Elle sèche en surface en une semaine si vous travaillez en couche mince et est parfaitement sèche au bout d’un an. Oui un an !!
Si on se focalise uniquement sur le sec en surface, une semaine c’est long. Vous comprenez peut être mieux maintenant le besoin de réduire ce temps pour les gens qui peignent au quotidien.

Petit aparté sur le séchage de l’huile : celle ci ne sèche pas mais polymérise par oxydation, processus très lent et long surtout pour une polymérisation en profondeur.

Notre résine

Nous utilisons la résine Damar ou Dammar. C’est une résine naturelle collectée sur des résineux en Indonésie (pour des couts de main d’œuvre j’imagine). Elle jauni peu, est transparente, donne de la brillance et est résistante.

A très court terme c’est le coté figeant de la résine qui nous intéressera particulièrement. En fonction du dosage de la résine dans le médium vous pouvez avoir un temps de travail évolutif avec des effets de peinture variant chaque heure et une couche assez bien figée en fin de journée.

Concernant la solidité de la résine, ceux qui ont laissé leur voiture sous un pin en été se souviennent sans aucun doute la difficulté, voire l’impossibilité, d’ôter les goutte de résine sans endommager la peinture de la carrosserie. C’est cette solidité qui fixe et protège sur le long terme les couleurs de la peinture.

Notre essence

Nous avons opté pour l’essence de térébenthine rectifiée. C’est l’essence communément utilisée par les peintres depuis la naissance de la peinture à l’huile. Il est très important qu’elle soit rectifiée. Dans le commerce vous trouverez facilement de l’essence dite « pure gemme » c’est une bonne qualité mais insuffisante pour la peinture à l’huile. Elle doit être rectifiée, ça veut dire qu’elle doit être distillée une seconde fois. Une essence non rectifiée jaunira fortement les couleurs en moins d’une semaine et donnera, en mélange avec le damar, une surface poisseuse au toucher.

Qui dit double distillation dit prix multiplié par cinq. Allez comprendre la logique…

La recette de notre médium

Le principal problème des peintres à l’huile est de fabriquer un médium qui donne un bon compromis entre l’onctuosité de l’huile, son travail sur la durée tout en limitant au maximum son temps de séchage afin de pouvoir avancer dans son travail sans devoir laisser sécher une à deux semaines.

Donc suffisamment gras pour le moelleux de l’huile, le travail et suffisamment maigre pour une reprise très rapide sans déplacer la couche inférieure. En d’autres mots le peintre aura besoin d’un médium qui va figer rapidement mais pas trop vite. Nous entrons dans le « Ni trop, ni trop peu ».

Le médium

  • 1 volume d’huile de lin clarifiée
  • 1 volume de damar D.33 liquide
  • 1 volume d’essence de térébenthine

Le point le plus important de la recette est le damar liquide. La notation « damar D.33 » est une appellation maison pour noter la dilution (D.33 = 33% de damar). Sa fabrication, ses multiples dosages possibles donneront au final les différentes caractéristiques du médium.

Le damar liquide

Un damar liquide très concentré donnera un médium à prise très rapide, parfait pour les superposition de touches.
Un damar liquide faiblement concentré donnera un médium à prise lente donc idéal pour un beau travail de fondu.

Le damar liquide est fabriqué à partir des cristaux de damar que l’on dissout dans de l’essence de térébenthine rectifiée.

  • 30% en poids de résine damar (ex : 300g)
  • 70% en poids d’essence de térébenthine (ex : 700g)

La concentration en damar/essence peut varier de 25/75 pour le moins concentré (damar D.25) à 50/50 pour le plus concentré (damar D.50).

Dans mes cours j’utilise un médium a faible concentration de damar. Moins il est concentré plus on aura le temps de travailler les fondus.

 

Le comportement du médium au cours de la séance de travail

Durant la première journée toute l’essence va s’évaporer, Il ne restera que l’huile et le damar. Celui-ci figer sans pouvoir durcir parce l’huile reste liquide, la couche de peinture va se figer et devenir collante au toucher. Au fil des jours et des semaines l’huile va polymériser et se solidifier, le damar va pouvoir durcir en même temps.

Le séchage du médium

Le médium va très vite changer au fil de la séance de peinture. L’essence va s’évaporer et le damar va commencer à figer. Le médium très fluide au début va devenir de plus en plus mielleux heure après heure.
Il en va de même pour la couche posée sur le tableau, elle est très malléable et mélangeable au début et va devenir de plus en plus fixe et légèrement collante au cours de la journée.
Donc le début de la séance est idéal pour les fondus, les dégradés, pour un travail moelleux tout en rondeur.
Après quand le médium va devenir mielleux et la couche collante c’est le bon moment pour les reprises en touches et le travail de superposition.
Si on ajoute un peu d’essence dans son médium et en retravaillant avec insistance on peut arriver à défiger la couche. Cependant on ne retrouvera pas la fluidité et la malléabilité du début de la séance.

Les autres médiums

En peinture à l’huile il existe des tas de recettes de médium avec ou sans résine, avec ou sans siccatif, avec des huiles partiellement polymérisées, avec différentes essences. Certains peintres peignent directement sans médium avec la couleur sorti du tube. Bref tout est possible même si tout n’est pas académique.

Notre recette n’est pas universelle et n’a pas vocation à être la VRAI recette. C’est juste celle qui se rapproche des recettes des peintres flamands et de ceux de la renaissance italienne.